La réforme territoriale vue par le MoDem

Jacqueline Gourault, sénatrice du Loir-et-Cher, est aussi une spécialiste de la réforme territoriale. Une fidèle de François Bayrou. Elle s’exprime régulièrement sur cette question. En ce moment, c’est le congrès de l’Association des maires de France (AMF) dont elle est vice-présidente. A ce congrès, les élus locaux rappellent qu’ils tiennent au report de la date butoir d’adoption par les territoires du schéma de coopération intercommunale et, surtout, que ce report soit inscrit dans une loi parce sans cela c’est la loi du 16 décembre 2010 qui va s’appliquer avec son couperet du 31 décembre 2011.

Le délai doit être prévu par une loi, qui devra « passer avant la fin de la législature« , insiste Jacqueline Gourault, sénatrice et présidente de la commission intercommunalité de l’AMF. « Il y a la parole du Premier ministre. Mais, c’est la loi qui s’appliquera au tribunal administratif en cas de contestation« , précise-t-elle. La sénatrice a aussi déclaré qu’il serait judicieux de chercher comment permettre aux élus aujourd’hui vice-présidents de communautés de conserver leur fauteuil jusqu’en 2014 afin de faire adhérer les élus locaux concernés aux transformations en vue. Mais tout cela est peut-être du chinois pour vous ? Alors vite « La réforme intercommunale pour les nuls » !

La loi de 2010 « de réforme des collectivités territoriales »

La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 a réformé des pans importants de l’intercommunalité française. La loi prévoit :

– l’achèvement et la  rationalisation de la carte intercommunale, de manière à ce que toutes les communes soient intégrées dans une intercommunalité à fiscalité propre dès le 1er janvier 2014.
– la création des métropoles, plus intégrées que la communauté urbaine, qui sont dotées de compétences issues des communes, comme des départements et des régions, et regroupent des aires urbaines de plus de 500 000 habitants.
– l’instauration d’un mode d’élection directe des conseillers communautaires représentant les communes de plus de 3 500 habitants, à partir des élections municipales de 2014.
– la reprise de l’incitation au regroupement des communes, par la création des communes nouvelles, qui peuvent procéder de la transformation d’une intercommunalité en commune.
– le maintien des pays existants jusqu’à leur terme, mais supprime la possibilité d’en créer de nouveaux.

Panorama de l’intercommunalité

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) constituent la forme institutionnelle de l’intercommunalité. On distingue :

– les syndicats intercommunaux (forme la plus souple d’intercommunalité), qui sont des EPCI sans fiscalité propre et sont donc financés par les contributions des communes membres, ainsi que par les revenus de leur activité. Il s’agit des SIVU (syndicats intercommunaux à vocation unique), des SIVOM (à vocations multiples), et des syndicats mixtes.

– les EPCI (établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, caractérisés par un financement direct par les contribuables au moyen d’une fiscalité directe locale, ainsi que par l’existence de compétences obligatoires. Ce sont :

* Les métropoles : créées par la loi de 2010
* Les communautés urbaines (CU) : loi de 1966
* Les communautés d’agglomération (CA)     Loi Chevènement (1999)
* Les communautés de communes (CC) : loi ATR de 1992
* Les syndicats d’agglomération nouvelle (SAN)

Fonctionnement

Une communauté est créée par délibération concordante des communes selon des règles de majorité qualifiée. Depuis 1999, son périmètre doit respecter un principe de continuité territoriale. Une commune ne peut appartenir qu’à une seule communauté.

Leur organisation interne est proche de celle des collectivités territoriales : un organe délibérant, un exécutif, un bureau. Les conseillers communautaires sont aujourd’hui élus par chaque conseil municipal parmi les conseillers municipaux. Le comité Balladur a proposé leur élection directe, par les citoyens, sur les listes municipales en 2014.

L’Assemblée des communautés de France, créée en 1989, est la fédération nationale des communautés.

Comment le MoDem voit la réforme territoriale

Rappelons tout d’abord que Jacqueline Gourault n’a jamais admis la manière forte avec laquelle la réforme a été imposée au Sénat par le gouvernement et l’UMP. Elle conteste en particulier le mode d’élection uninominal qui s’appliquer au conseillers territoriaux en 2014. Elle milite pour une part de proportionnelle. Voir ici la vidéo (c’était avant le vote de la réforme). Son attachement au scrutin mixte, c’est-à-dire un scrutin uninominal corrigé par une dose de proportionnelle et son opposition au mode de scrutin uninominal à deux tours, n’a pas été entendu par le gouvernement. Le scrutin retenu va conduire, selon la sénatrice MoDem, à une baisse du nombre de femmes élues, à réduire leur rôle dans la vie politique locale et à faire disparaître le « fait régional« . Par ailleurs, les économies espérées ne seront pas atteintes. Pour la sénatrice : « Des assemblées pléthoriques sont attendues dans chaque région ».

Quand la réforme des collectivités territoriales fut adoptée par le Sénat en novembre 2010, Jacqueline Gourault, qui avait voté contre, exprima son dépit. « une  occasion manquée« , dit-elle. « En installant le comité Balladur, le Président de la République voulait simplifier, clarifier, économiser, bref moderniser et renforcer la démocratie locale. Où en sommes-nous ? Simplifier l’architecture territoriale ? Le paysage local devient incompréhensible ; une fois de plus, on annonce la suppression de structures, et de nouvelles apparaissent. Clarifier les compétences ? On a cédé à la facilité en renvoyant le problème à 2015, tandis que l’État, sur le terrain, réorganise ses services. Les élus de 2014 ne sauront pas quelles compétences ils exerceront ! »

Pour Jean Lassalle, député MoDem des Pyrénées-Atlantiques et chargé des collectivités territoriales, « En France, comme en Europe, une fâcheuse tendance s’instaure depuis une vingtaine d’années. Elle consiste à conduire les grandes orientations de haut en bas en ne prenant jamais la tâche du citoyen de la base« . « La loi sur la reforme territoriale et l’intercommunalité, s’inscrit tout à fait dans cette logique. S’il a été beaucoup question des conseillers territoriaux, et de l’extension exponentielle des intercommunalités, il a été très peu parlé de l’avenir de nos communes« , a t-il soulevé avec conviction. Jean Lassalle – Questions au gouvernement -… par mouvementdemocrate

« Nos forces, ce sont les territoires français ! »

Dans le Morbihan, le jeudi 6 octobre, aux côtés de Michel Guégan, Maire et précurseur en matière de coopération intercommunale (*), François Bayrou a pointé « les violences faites aux territoires ces cinq dernières années« . Le président du Mouvement Démocrate a opposé à la réforme très controversée des collectivités locales, « l’équilibre » et la « proximité« . (lien)

[ (*) La première Communauté de Communes de France est créée en 1992 dans le Val d’Oust, dans le Morbihan. Michel Guéguan, premier président de cette structure, est aussi le porteur de l’intercommunalité en France et en Europe, notamment de l’est. ]

François Bayrou parcourait le Salon des Maires et des Collectivités locales, mercredi 23 novembre. Entouré de responsables du MoDem et de nouveaux soutiens, comme le député Daniel Garrigue, ex-porte-parole de Dominique de Villepin, ou Alain Lambert, président du Conseil général de l’Orne et ex-ministre du Budget de Jacques Chirac, il a déclaré : « Tout se passe aujourd’hui comme si on voulait imposer l’idée que plus c’est gros et mieux c’est, plus on rassemble et plus en fait d’économies. Moi je crois que c’est exactement le contraire. Plus on éloigne les centres de décision et plus on a besoin de fonctionnaires pour faire le relais et plus cela coûte cher. Il faut trouver un équilibre« .

Pour la réforme intercommunale, finalement l’AMF a obtenu gain de cause. Le gouvernement va porter à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale la proposition de Jacques Pélissard (député-maire de Lons-le-Saunier et président de l’AMF) qui doit corriger certains défauts de la réforme et reporter la date d’adoption de la carte intercommunale.

 

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