Vivre chez soi quand on est vieux et dépendant

90% des nonagénaires et la moitié des 6000 centenaires français vivent toujours à leur domicile mais ils encourent des risques importants de chute, faute d’adaptation de leur logement. Plus de 6 000 personnes âgées décèdent chaque année des suites d’une chute à leur domicile. Selon le groupe Ciliopée qui est à l’origine du plan « vivre chez soi » dessiné en 2010, il est pourtant possible d’effectuer les adaptations les plus courantes pour un coût d’environ 3200 euros.

Benoît Apparu, ministre du logement, évalue lui à 30% les plus de 65 ans qui habitent dans des logements non adaptés à leur situation de vie. Face au défi du vieillissement et de la perte d’autonomie, la politique de maintien à domicile se déploie mais certaines mesures ne sont pas de bon aloi. Ainsi en est-il des déductions fiscales pour les aides à domicile dont ne profitent pas les personnes âgées non imposables dépendantes d’aides extérieures.

Services à domicile : pour les gens aisés, pas pour les gens âgés

Si depuis 1991, les ménages peuvent déduire de leurs impôts la moitié des dépenses consacrées aux services à domicile, cette mesure laissait à l’écart les personnes âgées non imposables. Les 10 % de ménages les plus aisés profiteront alors à plein de cette aubaine. Alors, à partir de 2008, la mesure a été transformée en crédit d’impôt afin de l’étendre aux foyers qui ne paient l’impôt sur le revenu. En effet, la moitié des sommes dépensées sera reversée aux ménages employeurs, qu’ils s’acquittent de l’impôt sur le revenu ou non. Seulement voilà, l’INSEE fait observer que « cet avantage ne concerne que les ménages actifs, c’est-à-dire dont le ou les membres adultes sont en emploi, ou demandeurs d’emploi depuis au moins trois mois. Les retraités ne pourront pas bénéficier de cette mesure d’extension alors même qu’ils représentent près de 80 % des ménages utilisateurs non imposables. » (rapport pdf sur le site de l’Insee, page 158) Pour en bénéficier, il faut que tous les adultes du foyer soient actifs ! Cette aberration est contreproductive et nuit à la politique de maintien à domicile des personnes âgées.

La réforme du maintien à domicile suspendue

Les choses paraissent suspendues. Pourtant, en 2010, Nora Berra, alors secrétaire d’État chargée des Aînés, avait présenté les 18 propositions des six groupes de travail de la mission « Vivre chez soi ». Ce programme visait l’amélioration du cadre de vie des personnes âgées et comportait 8 mesures, faciliter l’accès aux technologies et aux services facilitant le maintien à domicile, en encourageant le développement d’une offre adaptée, modernisation des services à la personne. Tout semble bloqué en attendant l’annonce par le chef de l’Etat du démarrage de la réforme sur la dépendance. Annonce qui ne viendra sans doute pas avant l’élection présidentielle de 2012.

En attendant, Roselyne Bachelot a plus ou moins calmé les départements et associations en lâchant 50 millions pour l’aide à domicile pour 2012. Ce qui est d’ores et déjà jugé insuffisant.

La question de l’habitat dans les débats sur la dépendance

Les débats sur cette question avaient pourtant bien commencé. Et puis, l’Etat a laissé tomber la réforme de la dépendance. Reportée aux calendes grecques… Tant pis pour les familles ! Tant pis pour les asociations du secteur dont certaines sont en grandes difficultés voire en liquidation judiciaire (comme dans le Finistère) !

Quelles étaient les pistes dessinées ? Les groupes de réflexion sur la dépendance prônaient « l’obligation pour les communes et les intercommunalités de prendre en compte le vieillissement dans les documents locaux d’urbanisme » et le nécessaire développement d’habitats adaptés ou adaptables à la perte d’autonomie. Ainsi que l’accès à « une large gamme de modes de vie à domicile », par le développement de « formules intermédiaires » entre tout-domicile et établissement. Les députés et les experts en étaient au stade du brouillon et s’opposaient sur les solutions mais un consensus était trouvé sur les viagers HLM, qui auraient permis aux organismes d’acquérir des logements (dont une partie proche des centres-villes) et de les récupérer au décès des occupants, après que ceux-ci auront bénéficié de leur vivant de travaux de réaménagement financés par les bailleurs publics, ainsi que d’un complément de revenu liée à la vente en viager. La proposition est soumise au gouvernement par Muriel Boulmier en juin 2010. Depuis, rien.

Tout cela n’a plus cours. Aujourd’hui, la seule obsession de l’UMP est de rassurer les marchés, d’éviter la perte du « triple A » et le krach bancaire. Les vieux attendront.

 

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