Les services à domicile en danger

« Les déductions fiscales pour les services à domicile  sont préservées » titre le quotidien La Croix ce jeudi 1er décembre. « Je cite : L’Assemblée nationale a finalement décidé de préserver les déductions fiscales pour les services à domicile, en rejetant, le 1er décembre, un amendement de l’UMP visant à les réduire. Le gouvernement s’y est opposé, mettant en avant « l’impact extrêmement fort sur l’emploi », a expliqué la ministre du budget Valérie Pécresse, qui craint un retour du travail clandestin.

Or, non ! Cher journal La Croix, tu t’es fait berner, comme à peu près tout le monde, par la manœuvre, qui est classique. Première phase de l’opération : On annonce des coupes sombres voire des coupes claires dans le budget. Deuxième étape : on laisse bien mijoter et on écoute râler les acteurs concernés. Enfin, dernière étape : c’est le « ouf ! » de soulagement devant la décision du gouvernement de maintenir les crédits. Car, on l’a vu dans plusieurs domaines, le maintien veut dire la stagnation face à des besoins en hausse, voire un maintien de surface alors que l’on rogne ailleurs par d’autres voies peu visibles. Ce manque de transparence et ces fausses annonces font qu’au final, ça fait moins mal. Comme disait Coluche, « c’est pas plus mal que si c’était pire ! »

Pour t’aider, cher journal La Croix, je vais dénouer l’affaire et décliner toute une série de bémols, de quoi déchanter un peu.

1 – L’Assemblée a adopté un amendement gouvernemental précisant les modalités du soutien aux services d’aide à domicile. Mais, seule la moitié des 50 millions d’euros annoncés se traduiront en crédits de paiement dès 2012 car les autres 25 millions seront affectés à l’exercice budgétaire de 2013 !

2 – L’aide exceptionnelle de 25 millions d’euros ne coûtera rien à l’État. Elle sera prélevée sur le Fonds national des solidarités actives (FNSA), qui finance notamment le RSA. Et pourquoi donc prend-on ces crédits sur l’insertion ? Je pose la question : est-ce normal ?

3 – Pour Valérie Pécresse, la ministre du Budget, cela fait bien 50 millions d’euros pour 2012 car elle inclut le coût du rétablissement de l’exonération des cotisations sociales sur certains services à domicile à destination des familles fragiles, adopté par l’Assemblée dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et qui représenterait, lui aussi, une dépense de 25 millions d’euros.

4 – Le gouvernement introduit également dans le projet de loi de finances pour 2012 le principe d’une expérimentation sur les modalités de tarification des services autorisés d’aide à domicile. Les expérimentations pourront permettre de dégager des propositions de réforme « à coûts constants » des modalités de tarification des services. «Elles viseront à allouer les moyens de façon plus efficiente ». Voilà bien une formule absconse qui annonce des lendemains austères.

Dans ce contexte, les professionnels du secteur ont d’ores et déjà, dans un communiqué commun du 16 novembre, dénoncé la supercherie et exprimé leurs craintes pour l’avenir : « La fermeture de structures et les suppressions d’emploi vont s’accentuer tandis que l’accompagnement à domicile des personnes fragiles continuera d’en pâtir ».

Alors, le journal La Croix a raison de dire que l’amendement restrictif de Chantal Brunel, qui avait été adopté en commission, a été retiré faute d’unanimité (cet amendement voulait réserver les réductions d’impôts pour les activités de loisir et détente aux personnes âgées, handicapées ou dépendantes). Mais il paraît qu’il y a des abus dans ce domaine. Doit-on se réjouir qu’on ait fermé les yeux sur certains abus s’ils sont avérés ?

Allez ! Il ne sera pas dit que je pêche par pessimisme. Voici deux notes plus positives :

L’exonération de charges « aide à domicile » pourrait bientôt être élargie. A l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2012, les députés ont voté à l’unanimité un amendement de la députée Bérangère Poletti qui exonère des cotisations sociales les rémunérations des aides à domicile intervenant auprès des familles fragiles. Cela vise, d’une part, les techniciennes de l’intervention sociale et familiale (TISF) envoyées par le Conseil général dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance auprès de familles en difficultés et, d’autre part, les aides aux familles envoyées par les CAF, via des associations ou organismes agréés ou autorisés.

Le rétablissement de l’aide ménagère à domicile dans la fonction publique est acquis. Lors du débat parlementaire sur le PLFSS 2012, François Sauvadet, le ministre de la Fonction publique, a annoncé le rétablissement de l’aide ménagère à domicile qui avait été supprimée le 1er janvier 2009, alors qu’elle concernait environ 30.000 fonctionnaires retraités (en majorité classés en GIR 6). L’objectif était alors de recentrer l’aide ménagère à domicile sur les personnes en attente d’un classement en GIR 4. Un recentrage qui aura pris plus de trois ans (sont classées en GIR 4 les personnes âgées qui sont à la limite de la grande dépendance).

 

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