Il faut revoir le surloyer

Le supplément de loyer de solidarité (SLS), communément appelé « surloyer » a été créé par le décret du 21 août 2008 en application de la loi ENL du 13 juillet 2006. Remis au goût du jour avec la loi Boutin de 2009 (loi dite Molle), il est aujourd’hui très contesté. Très compliqué à expliquer et à mettre en œuvre, son application peut aussi nuire au principe de mixité sociale des quartiers sociaux.

I – Comment concilier surloyer et mixité sociale ?

Un conflit oppose le Le secrétaire d’Etat au Logement Benoist Apparu aux présidents de Plaine Commune et de Plaine Commune Habitat de Seine-Saint-Denis. Ces derniers on adressé un courrier à tous les locataires pour les informer qu’ils n’appliqueraient pas le surloyer. Pourquoi cette position ? Ils l’expliquent par le souhait de « ne pas alourdir le budget logement des locataires » et de « pérenniser les offices publics comme outils de justice sociale ». Mais ils jugent aussi que le surloyer nuit au maintien d’une certaine mixité sociale puisqu’il fait fuir les classes les plus favorisées des quartiers qui deviennent de plus en plus des ghettos.

Ce n’est bien sûr pas du goût de Benoît Apparu qui rappelle la loi et la mission première du parc social : « loger les plus modestes mais aussi ceux qui pour de multiples raisons ne trouvent pas de logement sur le marché ». Dans ces conditions, il ne peut pas « accepter que des personnes fragiles payent des loyers élevés dans le parc privé, pendant que des personnes qui ont vu leur situation évoluer positivement se maintiennent dans des logements sociaux ». L’ennui c’est que l’Etat n’est pas cohérent puisque le préfet de Seine-Saint-Denis n’a formulé aucune réserve quand le conseil communautaire de l’agglomération Plaine Commune a adopté, il y a deux mois, son programme local de l’habitat (PLH), qui s’est prononcé clairement contre l’application du surloyer.

Soyons juste, le surloyer de solidarité (SLS) a été adouci : en effet, il est appliqué si les revenus du foyer dépassent de 20% les plafonds de revenus, contre 60% avant la loi Molle. Cette loi prévoit que les logements HLM sont dispensés du SLS dès lors qu’ils sont situés dans des zones géographiques ou des quartiers exemptés de surloyer par le programme local de l’habitat, ce qui est désormais le cas de 97% du territoire de Plaine Commune. Sur les 3% restants, seule une partie des familles atteignent le seuil et pourraient être soumises au surloyer.

II – Le surloyer est un casse-être incompréhensible pour les locataires

Le système de surloyer est un véritable casse-tête à mettre en œuvre. Il n’est pas du tout transparent pour les  locataires HLM qui doivent subir le parcours du combattant pour obtenir des informations et savoir s’ils seront ou pas imposés.

Il existe un tableau de barème détenu par l’organisme HLM propriétaire de l’appartement mais l’organisme HLM est le plus souvent en incapacité de vous répondre ou s’y refuse tout bonnement. Il faut voir comme le système est compliqué. Je vais essayer de faire simple :

Le SLS s’applique de plein droit. Ce qui signifie que les organismes d’HLM sont tenus d’exiger des locataires dont les ressources dépassent les plafonds fixés pour l’attribution du logement à loyer modéré qu’ils occupent, le paiement d’un supplément de loyer de solidarité. Mais la convention d’utilité sociale (CUS) signée entre les organismes HLM et l’État peut y déroger dans le respect néanmoins du PLH (programme local de l’habitat) lorsque celui-ci prévoit des dispositions relatives au supplément de loyer de solidarité.

Des logements sont exclus du SLS : Il s’agit des locaux n’ayant pas le caractère de logements locatifs (logements-foyers, logements à usage commercial ou associatif), des logements exclus en raison de leur localisation : les PLH, lorsqu’ils ont été élaborés avec les bailleurs sociaux, peuvent déterminer, après avis conforme du représentant de l’État dans le département, les zones géographiques ou les quartiers où le supplément de loyer de solidarité ne s’applique pas. Enfin des logements exclus en raison de leur mode de financement (exemple : financés par subvention de l’ANAH)

Après le principe et le champ d’application, parlons de la mise en œuvre du surloyer. Un décret du 21 août 2008 relatif au supplément de loyer de solidarité (« surloyer »), pris en application de la loi ENL du 13 juillet 2006, précise les modalités de mise en œuvre de ce dispositif. Le SLS est exigible dès lors qu’en cours de bail, les ressources de l’ensemble des personnes vivant au foyer excèdent d’au moins 20 % les plafonds de ressources en vigueur pour l’attribution des logements.

Afin d’éviter que les ménages concernés ne soient amenés à acquitter un loyer supérieur à celui qu’ils devraient payer s’ils étaient logés dans le secteur libre, le montant du SLS est doublement plafonné.

– Plafonnement lié à la zone d’habitat : Le montant cumulé du loyer principal et du SLS ne doit pas excéder un plafond fixé par mètre carré de surface habitable et modulé selon un zonage correspondant à celui du dispositif « Robien ». La loi Molle a prévu un plafonnement complémentaire afin que le total du loyer et du surloyer ne dépasse jamais les prix pratiqués dans le même quartier par le parc privé. Ce deuxième plafonnement a été réglé par le décret du 29 juillet 2009.

– Plafonnement lié aux ressources : Conformément à l’article 71 de la loi ENL, le SLS est plafonné à la somme loyer + surloyer à 25% des ressources annuelles du ménage (sauf exception). Toutefois, le PLH peut porter ce plafond jusqu’à 35 %. Il vous faudra donc prendre connaissance de ce document d’urbanisme : bon courage !

La mise en œuvre se complique d’un système de modulations du SLS : Les CUS peuvent prévoir, dans les zones caractérisées par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements, un dispositif de modulation du SLS.  Ce dispositif vise à adapter les loyers aux réalités locales. Les zones géographiques visées sont celles qui sont éligibles à la réduction d’impôt « Scellier ». La loi Molle offre aussi aux bailleurs la possibilité de moduler sous certaines limites leurs surloyers en fonction des revenus des locataires dans le cadre des CUS (qui doivent être approuvées avant le 30 juin 2011). Et ceci nonobstant les plafonds de loyers. Mais il s’agit d’un dispositif expérimental valable sur la durée des CUS et reposant sur une base volontaire. Un décret du 4 mars 2011 fixe la part minimale et maximale des ressources pour la modulation à titre expérimental des loyers.

Conclusion

On le voit, certaines communes ou communautés refusent d’appliquer le surloyer dans le but de favoriser la mixité sociale. Lorsqu’il est appliqué, personne n’y comprend rien et le locataire mis à contribution peut avoir le sentiment de se faire avoir. Il faut de la mixité sociale. Il faut aussi appliquer le supplément prévu aux locataires dont la situation s’est améliorée depuis leur entrée dans les lieux, sans quoi ils tirent un avantage injustifié par rapport aux locataires du privé qui n’ont pas eu la chance d’obtenir un logement social. Mais il est indispensable de simplifier et de clarifier le dispositif, de le rendre plus efficace aussi en atténuant ses effets pervers. Sur le site du Médiateur de la République, un intervenant formule quelques solutions possibles :  un tableau de plafonds unique qui ne pénalise pas les smicards et les classes moyennes dans un but évident de mixité sociale, geler le taux de surloyer applicable, supprimer la possibilité offerte d’augmenter le plafond dans le PLU, permettre une modulation du loyer seulement à la baisse. En tous les cas, il est urgent de revoir le surloyer.

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Une réponse à Il faut revoir le surloyer

  1. hubert dit :

    Effectivement se sont toujours les classes moyennes qui en subissent les conséquences, les locataires s’en rappelleront devant les urnes.il y a déjà eu des miettes
    aux cantonales.

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