Il y a trop de communes en France. Ce n’est pas l’auteur de l’article qui l’affirme, c’est le Sénat qui s’appuie sur un rapport d’étape des sénateurs Yves Krattinger (PS) et Jacqueline Gourault (MoDem). L’Allemagne a ramené de 24.282 à 8.513 le nombre de ses communes, la Suède sué pour passer de 2.532 à 290, et l’Autriche anschlussé pour passer de 4.000 à 2.356. Et la France ? Eh bien, elle compte 36 783 communes. Dans mes années d’études, on comptait 36 660. Le nombre a donc même un peu augmenté. Alors, la France lanterne rouge ?
Nos chères 36 783 communes françaises représentent 40 % du total des communes de l’Union européenne ! Ah, il n’y a pas à dire, on fait fort chez les Gaulois ! Quand le nombre de communes se réfuit fortement chez nos voisins, chez nous il augmente, ouvrant la voie aux Clochemerle où le coq gaulois a un choix étendu de tas de fumier sur lesquels il peut s’ébrouer. Les communes, ça prolifère plus que les fromages !
On peut lire l’épais rapport d’étude sur le site du Sénat
Cocorico : le triptyque français est bon !
Il est intéressant de constater que le système français, avec trois échelons, est bel et bien dans la « norme » européenne, se réjouissent les rapporteurs. Sept des douze pays analysés par l’institut Thomas More disposent d’un échelon intermédiaire analogue au département français. Seuls trois pays possèdent uniquement deux échelons (Autriche, Danemark, Roumanie). Et pour remuer le couteau dans la plaie des conseillers généraux réticents au projet de réforme territoriale, on observe aussi que la question de la clause générale de compétence est plutôt une question franco-française puisque le niveau intermédiaire est, dans la plupart des pays européens, spécialisé sur des compétences clairement identifiées.
Mais nous devons revoir notre copie pour les communes
Les communes sont, dans tous les Etats européens, le pivot de l’organisation territoriale. Leur nombre particulièrement élevé, leur morcellement et leur diversité, constituent en revanche une spécificité française.
L’échelon local garde toute sa légitimité dans l’ensemble des pays européens : malgré la diversité de ses formes et de sa taille, le niveau communal reste plus que jamais « l’acteur de proximité » et un « espace d’exercice démocratique ».
Face au morcellement communal, le législateur français a, à deux reprises, tenté un remodelage de la carte des communes françaises en encourageant leur fusion ou leur regroupement. D’abord en 1959 : résultat assez minable : 350 fusions avaient été réalisées pour le regroupement de 746 communes. Puis en 1971 (réforme Marcellin) : 581 fusions intéressant 1 465 communes.
En France, on fait et on défait : les « défusions » :
Alors que la France comptait, avant 1959, 38 500 communes, le résultat des deux réformes cumulées n’a abouti dans un premier temps qu’à un abaissement du nombre des communes en dessous de 36 500. Ce nombre a ensuite recommencé à augmenter avec les « défusions » !
Résultat des courses, les pays européens nous ont tous dépassés, ceux que j’ai cités d’entrée mais aussi la Belgique, la Grèce, le Danemark et même la Lettonie !
La critique du système français est à relativiser :
En effet, alors que certains Etats qui ont conduit des politiques très volontaristes se demandent si une approche trop systématique n’a pas nui à la démocratie et à l’autonomie locales, le développement de la coopération intercommunale s’est progressivement imposé comme une réponse adaptée à l’émiettement communal français. Ces intercommunalités, ou « coopératives de communes » selon l’expression de Jean-Pierre Chevènement auteur de la loi du 12 juillet 1999, ont permis la mise en oeuvre des compétences auparavant laissées en friche, par exemple en matière de développement économique ou de politique de la ville.
Mais les défauts sont bien réels.
C’est ainsi que la réforme de 1999 (et dans une moindre mesure, celle de 1992) a donné une impulsion forte au développement de l’intercommunalité et permis d’aboutir à une couverture quasi complète du territoire en établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Au 1er janvier 2009, la France compte 2 601 groupements à fiscalité propre (contre 2 583 en 2008) regroupant 34 164 communes (528 de plus qu’un an auparavant),
Seulement voilà, ces EPCI sont venus se surajouter parfois aux modèles anciens de « coopératives de communes » : les SIVOM, les SIVU (*) et les syndicats mixtes de type loi 1955 (ces vieux prototypes n’ont pas de fiscalité propre contrairement aux EPCI). Si bien que les citoyens ne voient plus très clair dans ce maquis, ce millefeuille.
[ Les SIVU sont des syndicats de communes à vocation unique, les SIVOM, des syndicats de communes à vocation multiple)