La campagne est lancée et tous ceux qui, à droite comme à gauche, ont à craindre de la montée en puissance du Mouvement Démocrate s’en prennent à son chef oubliant toute retenue. A gauche, le PS et Cohn-Bendit, à droite Jean-François Copé, Rachida Dati et Dieudonné. La presse n’est pas en reste avec Marianne qui se fait un honneur de rappeler son indépendance, Jean-François Kahn étant parti.
Tout le monde tape sur Bayrou s’exclame Libération et c’est en fanfare que Jean-François Copé annonce « La méthode Bayrou décortiquée » sur le site Slate.fr. Mais qu’est-ce qu’on y apprend ? Rien ! Il ne tient pas ses promesses (défaut répandu chez les sarkozistes) en se contentant de brasser quelques banalités et de donner des faits que Bayrou lui-même révèle dans son livre. Un papier pour rien sauf pour le buzz criblé de pseudo réflexions d’un pamphlétaire de pacotille. Le style comme le fond sont loin d’avoir la tenue de l’ouvrage du président du MoDem, « Abus de pouvoir ». Mais le buzz est fait, à défaut de mal puisque l’escarmouche est dérisoire. La chronique a beaucoup fait réagir les internautes de Slate. Grand bien cela fasse à ce cite encore peu connu des internautes, mais la cible, elle, est ratée ! L’énarque champion de la langue de bois, homme politique à temps partiel qui préfère gagner de l’argent comme avocat que de servir à plein temps son pays, tire à blanc avec son pistolet de fête foraine et cela fait flop !
Premier pétard mouillé : Bayrou veut « se donner l’image d’un homme neuf pour mieux masquer son passé. Le « faux rebelle » est d’abord un homme d’appareil. Il a manœuvré dans toute une série de formations de droite depuis bientôt 30 ans : Centre des démocrates sociaux, tentative avortée des Rénovateurs, création de Force démocrate, nouvelle Union pour la Démocratie française et enfin Mouvement Démocrate. » Tous les lecteurs d’Abus de pouvoir » -et ils sont nombreux paraît-il (à peu près 50 fois plus nombreux que les lecteurs du dernier livre du clone de Sarkozy), ont déjà eu confirmation par Bayrou lui-même de ces épisodes dans une sorte de « Bayrou raconté par François » inclus dans le best-seller.
Quoi d’autre ? Bayrou crie « au loup pour faire un hold-up sur l’électorat de gauche. » Pas un seul instant Copé ne pense qu’un citoyen de gauche a un cerveau et un libre arbitre et qu’il peut choisir comme il l’entend de voter pour celui ou celle qu’il croit apte à la fonction convoitée. Il est vrai que les électeurs de l’UMP sont tellement méprisés et pris pour des imbéciles que Copé peut penser que les autres partis politiques traitent avec le même dédain le cerveau disponible de leurs électeurs.
Point 3 de la démonstration de Copé : « Ne rien proposer par peur de diviser. » Mais tout observateur de bonne foi voit davantage un rassemblement autour de Bayrou et du MoDem chaque jour plus important. Les derniers sondages donnent le MoDem en hausse et l’UMP et le PS en baisse. Alors, qui divise et qui rassemble ? En tout cas pas l’UMP où l’unité de façade cache bien des aigreurs et des frustrations et dont le chef, qui fait aussi office de président du pouvoir d’achat (des riches), est affligé d’une cote de popularité calamiteuse.
Enfin, son point 4 n’est pas un argument (problème de logique démonstrative navrante pour un énarque) mais une conclusion en forme d’injure : « François Bayrou est un joueur de poker qui espère que son tour arrivera un jour. » Voilà justement qui fait petit joueur !
Donc voilà l’ennui avec ces énarques de la politique langue de bois, et en particulier avec le sarkoziste Jean-François Copé, c’est que l’on n’apprend jamais rien d’eux. La politique est chasse gardée, un art secret que l’on tient loin du regard indiscret et vulgaire du Citoyen par des discours creux, des boniments et des leurres médiatiques. On n’enseigne rien, on ne dispense rien, le citoyen n’est pas digne de leurs leçons.
On trouvera des points de vue sur la toile qui n’émanent pas de fans de Bayrou et qui trouvent beaucoup à redire sur le papier de Copé. Celui-ci par exemple : « Atteindre un tel stade de niaiserie ne mériterait pas une once de curiosité, si cette pseudo-analyse n’était somme toute révélatrice de la réception du livre de Bayrou dans la presse« , écrit l’auteur de ce billet très bien troussé.
C’est devenu un sport national de s’en prendre à Bayrou et un bon moyen de faire parler de soi. La preuve, Dieudonné, dont le principal ressort de popularité est le scandale, a attaqué à son tour en contestant les listes du MoDem. Le Conseil d’Etat lui a donné tort (lire ici).
Car attaquer Bayrou, c’est faire parler de soi dans les médias. Mais gare aux conséquences. Daniel Cohn-Bendit (Verts) s’y est essayé en accusant Bayrou de « détourner la campagne pour sa course à l’Élysée« . Le président du MoDem lui a répondu ainsi qu’au PS qui préfère la petite phrase à l’argumentation : « Nous considérons, non pas qu’il y a un droit d’opposition, mais qu’il y a un devoir d’opposition, quand l’essentiel est en jeu. Et s’ils n’en veulent plus, nous, en tout cas, nous allons l’assumer ». Et oui, s’opposer, c’est un droit en démocratie et même un devoir, monsieur Cohn Bendit ! Mais Dany a mis la révolution au placard et prend des poses dignes d’un porte-parole de l’UMP. Jean-Luc Bennahmias, tête de liste du MoDem dans le Sud-Est, ancien secrétaire national de Verts et qui fut le directeur de campagne de Cohn Bendit en 1999, le lui fait remarquer en ces termes : « Dany, si la campagne d’Europe Écologie ne te suffit pas, tu n’es pas obligé de mener la campagne de l’UMP » Tu recycles les idées de l’UMP, renchérit Jean-François Kahn, tête de liste du MoDem dans l’Est et jamais la langue dans sa poche.
Enfin la multitude des candidats du PS à la présidentielle reproche à Bayrou de ne penser qu’à la Présidentielle. Quelle belle bande d’hypocrites : parce qu’eux, ils n’y pensent pas ! Il est grand temps de faire de la politique au grand jour devant les citoyens et d’arrêter de les prendre pour des enfants. La politique n’est pas un jeu que l’on pratique entre gens de bonne compagnie, n’en déplaise à Jean-François Copé pour qui la première référence qui vient est le poker. Il y a deux catégories de leaders politiques : ceux qui jouent, font semblant, se montrent hypocrites, dissimulent ou bonimentent (voire mentent tout court) et ceux qui parlent sans détours, qui voient la politique comme une chose sérieuse, comme une res publica une chose publique à laquelle les citoyens peuvent et même doivent contribuer.