Carla Bruni-Sarkozy a décidé de porter plainte contre l’hebdomadaire people. Elle l’accuse d’avoir publié des photos d’elle sans son autorisation. Le journal a publié des photos d’elle, prises le jour de la fête nationale au Fort de Brégançon par Var Matin où elle avait invité une dizaine de femmes de marins engagés en Libye.
Le droit à l’image trouve son fondement dans l’article 9 du code civil et dans l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Mais il s’agit surtout d’une création de la jurisprudence. Celle-ci le différencie d’ailleurs du droit au respect de l’intimité. Au nom du droit à l’image, toute personne peut s’opposer à la publication, sans son autorisation, de son image. Il s’agit d’un droit de la personnalité (et non d’un droit patrimonial). Conséquence : il s’éteint au décès de la personne concernée qui est seule titulaire de ce droit. La personne qui s’opposerait à la reproduction de l’image du défunt doit prouver un préjudice personnel.
Le caractère identifiable de la personne
Il ne peut y avoir d’atteinte à l’image que si une personne déterminée est identifiable du fait de la présence d’éléments la rendant reconnaissable. Pas nécessairement du grand public, mais aussi par des proches. La seule affirmation par une personne qu’elle se reconnaît n’est pas constitutive d’une atteinte au droit à l’image.
Le principe de l’autorisation
L’autorisation du représentant légal est obligatoire pour un mineur ou un incapable majeur. Toute personne a sur son image, quelles que soient sa notoriété, sa profession ou ses fonctions, un droit exclusif et absolu.
L’autorisation doit être spéciale. Si le juge admet qu’elle soit moins précise qu’en matière de propriété intellectuelle, elle ne peut pas être pour autant illimitée. Sa portée est restreinte. Par exemple, si sa finalité est pédagogique, elle ne permet pas l’utilisation de l’image à des fins commerciales.
L’autorisation doit être expresse. Elle peut dans certains cas n’être qu’implicite mais doit se déduire clairement des circonstances de fait (exemple : l’attitude de la personne photographiée). Elle ne se présume pas.
La charge de la preuve de l’autorisation pèse sur celui qui publie ou exploite l’image. L’autorisation peut être incluse dans un acte général comme le règlement intérieur d’une école.
La durée de l’autorisation : Lorsque l’autorisation a été donnée sans aucune limitation dans le temps ni aucune réserve, le consentement donné à la publication d’une photographie ne peut couvrir l’utilisation plusieurs années plus tard de cette photo.
Le retrait de l’autorisation : en cas d‘autorisation illimitée, le retrait n’a pas à être justifié. Il doit l’être pour les autorisations avec durée.
Le fait d’avoir toléré la publication antérieure d’images ne vaut pas consentement pour la publication présente et à venir.
Au-delà de la simple autorisation d’usage, la personne peut céder une autorisation commerciale voire même un monopole. Alors même que le droit à l’image est un droit de la personnalité, la possibilité de conclure des contrats sur l’image peut être analysée comme une forme de reconnaissance d’un droit patrimonial à l’image.
Les exceptions à l’obligation d’autorisation
– L’exception d’actualité :
La combinaison de la liberté de la presse et du droit à l’image se traduit par le principe qu’on ne peut s’opposer à la divulgation de son image chaque fois que le public a un intérêt légitime à être informé.
Deux conditions pour qu’il y ait exception : les informations données dans l’article qu’illustre l’image doivent constituer un fait d’actualité, la personne représentée doit être impliquée dans le fait d’actualité. Au contraire : détachée du fait d’actualité, la publication de l’image de la même personne sans son consentement constitue une faute. Exemple : publication de photo de manifestants identifiables à la Gay pride dans un article sur le PACS.
Le caractère légitime de l’actualité est une notion fluctuante selon les pays et les mœurs. Ainsi, la Cour de cassation admet-elle aujourd’hui que la révélation d’un problème de santé d’une personnalité connue est une information légitime. De même que l’incartade conjugale de l’époux d’une princesse. Mais pas les relations d’une personne avec un footballeur (non liée à un fait d’actualité suffisant).
L’image publiée doit être appropriée à l’objet relaté. Lorsque le contexte de l’utilisation d’une photo est totalement étranger au contexte dans lequel elle a été prise, sa diffusion sans autorisation est une atteinte à la vie privée.
La consistance du lien d’implication dans le fait d’actualité est laissée à l’appréciation des juges du fond. Le principe de liberté de la presse prévaut sous réserve du respect de la dignité humaine. Le contrôle du juge ne s’exerce pas seulement sur l’appropriation de l’image au sujet traité, mais aussi sur la sélection des images diffusables, leur cadrage…
– L’exception de vie publique
Il n’y a pas atteinte au droit à l’image lorsque la personne représentée (même mineure) se trouve dans un lieu public. Pas plus que l‘autorisation, le lien entre l’image et l’actualité n’est exigé. Le juge apprécie la condition de lieu public et contrôle que l’limage n’a pas été cadrée ou agrandie pour attirer l’attention sur la personne.
[ Le droit à l’image des personnalités publiques ]
Source droit-image.com
Dans le cadre de leurs activités publiques ou professionnelles, l’autorisation de publication de leur image est présumée.
Parfois, l’image d’une personnalité peut être considérée comme n’excédant pas le droit à l’information alors qu’il s’agit d’un événement privé. Pour exemple, des photos de Béatrice Schoenberg et Jean-Louis Borloo pour illustrer un article sur leur mariage. Car : « Le droit à l’information peut aussi concerner un domaine de la vie privée dès lors qu’il est motivé par un caractère d’intérêt général. Et que cette information peut être illustrée par des photographies si ces dernières sont pertinentes par rapport au sujet traité et qu’elles ne sont pas dévalorisantes. » Mais « La circonstance qu’une personne intéressant l’actualité se trouve dans un lieu public ne peut être interprétée comme une renonciation à se prévaloir du droit que chacun a sur son image et sur sa vie privée, ni entraîner une présomption d’autorisation. » Cela pose problème et amène à des jugements inégaux ou incohérents est la difficulté à déterminer la limite entre droit à l’information et respect de la vie privée.
La diffusion de l’image d’une personne prise dans le cadre privé nécessite l’autorisation de celle-ci.
Il faut noter que le consentement de la personne à être photographiée est différent de son autorisation à diffuser l’image. ]
– L’exception de vie professionnelle
La vie professionnelle relève de la vie publique. Il y a transfert à la personne publique du droit à l’image quand une personne est représentée sur une plaquette dans le cadre de sa fonction, dans un but d’intérêt général, sans détournement ni atteinte à la dignité humaine ni exploitation commerciale caractérisée (exemple : la vente de quelques cartes postales pour assurer quelques recettes à un musée).
Les conditions d’utilisation de l’image des personnes
L’image doit être utilisée dans le respect de la dignité humaine. La diffusion doit être faite de manière loyale (exemple le fait de tronquer une séquence d’une vidéo peut détourner les propos). Enfin, les trois exceptions ci-dessus à l’autorisation ne peuvent être revendiquées à l’appui d’utilisation commerciale, partisane ou dans un contexte dévalorisant.
[ Deux cas particuliers ]
Source droit-image.com
Personnes impliquées dans un crime ou délit
D’après l’article 92 de la loi du 15 juin 2000 sur la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes, est punie : « Lorsqu’elle est réalisée sans l’accord de l’intéressé, la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, de l’image d’une personne identifiée ou identifiable mise en cause à l’occasion d’une procédure pénale mais n’ayant pas fait l’objet d’un jugement de condamnation et faisant apparaître, soit que cette personne porte des menottes ou entraves, soit qu’elle est placée en détention provisoire »
Photographies de personnes décédées
La jurisprudence est constante sur cette question, estimant que le droit à la vie privée ne s’arrête pas au moment du décès et en condamnant la diffusion d’images de personnes décédées. Deux affaires célèbres se sont ainsi terminées par les condamnations des magazines: la publication de deux photos de François Mitterrand sur son lit de mort dans Paris Match, le préfet de Corse Claude Erignac assassiné (Paris Match et VSD avaient publié la photographie du corps gisant dans une rue d’Ajaccio). Inversement, la photographie d’une personne décédée a été autorisée, car elle était justifiée par « le libre choix des illustrations d’un débat général de phénomène de société ». (Cour de Cassation, 4 novembre 2004). Paris Match avait publié dans le cadre d’un article intitulé « Routes, la guerre oubliée », la photo d’un jeune homme inanimé, à demi dévêtu et le visage ensanglanté, autour duquel s’affairaient les secouristes, (sous-titrée par la légende : « Il faisait la course en scooter. Il avait 16 ans. Les médecins ne pourront le ranimer »).
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