A la croisée de trois évènements, on peut mesurer la faible volonté de favoriser la politique du logement.
Tout d’abord, c’est un rapport de la Miilos qui critique l’action des organismes du logement social. C’est ensuite le rapport du Cese qui pointe les larges imperfections du système. Enfin, à l’approche du congrès de l’Union sociale pour l’habitat (USH) – qui se tiendra à Strasbourg du 28 au 30 septembre 2010 – la Fondation Abbé Pierre déclare que la flambée du coût du logement pour les familles a explosé ces dernières années et que compter seulement sur les lois du marché serait grave en termes de conséquences pour les familles déjà en difficulté.
La Miilos alerte et fait des propositions
La Mission interministérielle d’inspection du logement social (Miilos) a publié son rapport annuel. Ce rapport servira de base de réflexion au congrès de l’USH. Dans ce document, la mission indique que 50% des organismes contrôlés ont pratiqué des augmentations de loyer supérieures aux recommandations ministérielles, tantôt pour assurer leur équilibre financier, tantôt pour permettre leurs investissements. Malheureusement, ces augmentations ont porté surtout sur les loyers des plus modestes. La mission relève également la faible volonté de certains organismes à construire sur les marchés tendus. Plus grave, les organismes continuent de recourir à des emprunts toxiques. Certes, une certaine prise de conscience liée à la crise encore chaude dans les mémoires, s’est ressentie, mais 27 % des organismes sont encore en situation critique. Enfin, la Miilos en appelle à la restructuration des organismes, visant particulièrement les petits organismes qui investissent peu et les coopératives HLM (au nombre de 163) à propos desquelles elle s’interroge sur l’intérêt de leur maintien. Mais il est vrai que la réforme de l’agrément devrait favoriser la restructuration du secteur par des regroupements.
Le rapport du Cese sur la loi DALO : bilan et propositions
Le rapport du Conseil économique, social et environnemental (Cese) sur l’évaluation relative à la mise en œuvre de la loi instituant le droit au logement opposable (DALO) pointe trois obstacles principaux à la bonne application de la loi :
– l’insuffisance de l’offre de logements dans les zones tendues (Ile-de-France, Rhônes-Alpes, PACA, Nord-Pas-de-Calais).
– le développement très embryonnaire de l’intercommunalité en matière de politique du logement dans les secteurs où les enjeux sont les plus lourds : l’Ile-de-France pratique l’immobilisme ! A noter aussi le manque de maîtrise du foncier utilisable pour le logement social.
– le manque d’impact de la condamnation de l’Etat. Ce dernier est condamné par la justice administrative à verser des amendes à un fonds géré par lui-même mais cette mesure revêt plus un caractère symbolique qu’opératoire.
Le Cese formule quelques propositions que l’Etat s’empressera d’ignorer : Tout d’abord, il suggère de taxer le stock de terrains nus constructibles. Le produit de la taxe serait reversé aux collectivités et intercommunalités pour financer le logement social. Ensuite, le Cese estime que la compétence logement devrait devenir obligatoire dans les communautés de communes situées dans les zones tendues. Il propose enfin de mettre un terme aux pratiques de loyers planchers qui conduisent les bailleurs sociaux a refuser l’accès au logement social aux plus pauvres. Pour ce faire, il suffirait de mettre en place un système assurantiel pour ces catégories sociales modestes à l’image du GRL (garantie des risques locatifs) qui existe pour les propriétaires bailleurs.
Les leurres du gouvernement
Le secrétaire d’Etat au logement, Benoît Apparu, brandit le regroupement des organismes comme la panacée : « Regroupez-vous, vous paierez moins d’impôt » et cela permettra « une plus grande efficacité et donc une capacité à construire plus ». Mais, sur la forme du regroupement, les organismes sont libres et l’Etat ne peut pas grand’chose. Par ailleurs, le secrétaire d’Etat a réduit l’aide à la pierre et assume son choix en prétendant que c’est pour concentrer les moyens là où les besoins sont les plus criants mais dans la réalité les crédits retirés ne vont pas vers les zones sinistrées. L’un de ses arguments est même fallacieux : il rappelle la masse importante des aides aux logements, mais c’est confondre l’aide à la personne avec l’aide à la pierre. D’ailleurs, l’aide à la pierre, parlons-en : en plus d’être réduite, elle va prioritairement vers les logements sociaux « de luxe » (les PLS) et peu vers les PLUS et les PLAI qui ont vu leurs subventions réduites. Rappelons aussi que lorsque l’Etat a supprimé les PALULOS, il n’a rien prévu pour les remplacer, sinon un écoprêt à 1,9%.
Bref, rien de nouveau sinon de la rigueur et des sacrifices pour les gens modestes et un défaussement de l’Etat et des villes riches face à leurs obligations.